Célia Grémy / Blog "Communication politique" - 19 octobre 2011
"Les Français font toujours le bon choix" : Quand un Président prend la parole pour mettre en garde les électeurs français
"Le bon choix" est une expression initiée par Valéry Giscard d'Estaing à
Verdun-sur-le-Doubs en janvier 1978 pour persuader l'électorat français
"flottant" et sa base, et les mettre en garde contre une victoire de la
gauche aux élections législatives prévues deux mois plus tard et les
blocages politiques qu'elle provoquerait : le ton affiché est
parternaliste mais il cache mal ses inquiétudes. Quelques jours plus
tard, VGE fonde l'UDF.
L'expression
reprise à grand bruit par Nicolas Sarkozy le 18 octobre 2011 pour répondre à une
question de journaliste sur la prochaine élection présidentielle 2012, au
moment même où le parti majoritaire semble déstabilisé par le choc des
primaires socialistes : cette "récupération sémantique" affichée
(Nicolas Sarkozy précise citer VGE) lui permet surtout, entre les
lignes, de mettre en garde les Français contre une victoire de la
gauche...
- Le 18 octobre 2011, Nicolas Sarkozy affirme : "Quand les Français choisissent, c'est par définition le bon choix", lors d'un entretien mardi avec l'AFP, RCJ et Radio J.
- Interrogé sur ses mauvais sondages, le président de la République, qui n'a pas encore déclaré sa candidature pour 2012, a répliqué qu'il n'avait "pas de commentaires à faire". "J'ai un travail à faire. Mon travail, c'est de protéger les Français, d'apporter des réponses à leurs problèmes. Et puis, on verra bien (...) Ce qui compte, c'est de faire son travail et après les Français choisiront. Et ce qu'ils choisiront, ce sera le bon choix", a-t-il dit.
Ci-dessous l'intégralité du discours prononcé par VGE à Verdun-sur-le-Doubs :
Mes chères Françaises et mes chers Français, Le moment s'approche où vous
allez faire un choix capital pour l'avenir de notre pays, mais aussi un
choix capital pour vous. Je suis venu vous demander de faire le bon choix
pour la France.
*
* *
Ce choix, c'est celui des élections législatives.
Certains, en les voyant venir, paraissent presque les regretter. Comme si
tout serait plus simple si les Français n'avaient pas à se décider et si
l'on pouvait décider pour eux !
Mais, puisque nous sommes en démocratie, puisque c'est vous qui avez la
parole, puisque c'est vous qui déciderez, il faut bien mesurer la gravité du
geste.
Trop souvent en France les électeurs se prononcent comme s'il s'agissait de
vider une querelle avec le pouvoir ou de punir le gouvernement.
C'est une fausse conception : le jour de l'élection, vous ne serez pas de
simples passagers qui peuvent se contenter de critiquer le chauffeur, mais
vous serez des conducteurs qui peuvent, selon le geste qu'ils feront,
envoyer la voiture dans le fossé ou la maintenir sur la ligne droite.
Il s'agit de choisir votre propre avenir.
Ce soir, je ne m'adresse pas aux blasés, à ceux qui croient tout savoir, et
qui ont une opinion sur tout.
Moi qui, dans ma fonction, connaît bien les limites du savoir, je m'adresse
à celles et à ceux qui cherchent, à celles et à ceux qui ne savent pas
encore, à ceux qui écoutent, à ceux qui se taisent, à ceux qui voteront pour
la première fois, à toutes celles et à tous ceux qui voudraient être sûrs de
bien choisir.
Je m'adresse à vous.
Certains ont voulu dénier au président de la République le droit de
s'exprimer.
Curieuse République que celle qui serait présidée par un muet !
Nul n'est en droit de me dicter ma conduite. J'agis en tant que chef de
l'État et selon ma conscience, et ma conscience me dit ceci :
Le président de la République n'est pas un partisan, il n'est pas un chef de
parti. Mais il ne peut pas rester non plus indifférent au sort de la France.
Il est à la fois arbitre et responsable.
Sa circonscription, c'est la France. Son rôle, c'est la défense des intérêts
supérieurs de la Nation. La durée de son mandat est plus longue que celle du
mandat des députés.
Ainsi, la constitution a voulu que chaque président assiste nécessairement à
des élections législatives et, si elle l'a doté de responsabilités aussi
grandes, ce n'est pas pour rester un spectateur muet.
Parmi mes responsabilités, j'ai celle de réfléchir constamment,
quotidiennement, aux problèmes de l'avenir, et de mettre en garde les
citoyens contre tout choix qui rendrait difficile la conduite des affaires
de la France.
C'est ce qu'il m'appartient de faire ce soir. Je vous donnerai tous les
éléments nécessaires pour éclairer votre décision. Mais, dans la France
républicaine, la décision dépendra de vous.
Que penseraient et que diraient les Français si, dans ces circonstances,
leur président se taisait? Ils penseraient qu'il manque de courage en
n'assumant pas toutes ses responsabilités. Et ils auraient raison.
Mais le président de la République n'est pas non plus l'agent électoral de
quelque parti que ce soit. Le général de Gaulle ne l'était pas. Je ne le
serai pas davantage.
Le président n'appartient pas au jeu des partis.
Il doit regarder plus haut et plus loin, et penser d'abord à l'intérêt
supérieur de la nation.
C'est dans cet esprit que je m'adresse à vous.
*
* *
Comme arbitre, je m'exprimerai avec modération, hors des polémiques et des
querelles de personnes.
*
* *
Comme responsable, je vais vous parler du bon choix. Le bon choix est dicté
par le bon sens.
Il faut regarder la réalité en face. Et elle vous répond ces quatre
vérités :
— il faut achever notre redressement économique ;
— il faut que la France puisse être gouvernée ;
— il faut avancer vers l'unité et la justice ;
— il faut assurer le rôle international de la France.
Et ce sont ces quatre vérités qu'à mon tour je vais vous dire.
*
* *
Il faut achever notre redressement économique.
La France hésite entre deux chemins : celui de la poursuite du redressement
et celui de l'application du Programme commun.
Il y a une attitude qui met en danger le redressement : c'est la démagogie
qui veut vous faire croire que tout est possible tout de suite.
Ce n'est pas vrai. Ne croyez pas ceux qui promettent tout. Vous ne les
croyez pas dans votre vie privée. Pourquoi voulez-vous les croire dans votre
vie publique ?
Les Français ne vivront pas heureux au paradis des idées fausses !
Je comprends bien que certains d'entre vous, certains d'entre vous qui êtes
devant moi, certains d'entre vous qui me regardez chez eux, à la télévision,
je comprends bien que certains d'entre vous soient tentés de voter contre la
crise.
Vous qui travaillez dur, vous qui avez peur que vos enfants ne trouvent pas
facilement un emploi, et auxquels on explique que tout s'arrangerait si vous
vous contentiez de changer ceux qui vous gouvernent, je vous comprends,
c'est vrai, d'être tentés de voter contre la crise !
Et d'ailleurs si c'était si simple et si on pouvait s'en débarrasser par un
vote, pourquoi ne pas le faire ?
Malheureusement, il n'est pas plus efficace de voter contre la crise que de
voter contre la maladie. La crise se moque des bulletins de vote.
La crise est comme l'épidémie, elle nous vient du dehors. Si nous voulons la
guérir, il faut bien choisir le médecin.
Et si nous pensons nous en débarrasser par la facilité, l'économie se
vengera, et elle se vengera sur vous !
Regardez où nous en sommes ! Au mois de décembre, le dernier mois connu : un
commerce extérieur en excédent, une hausse des prix ramenée à 0,3 %, un
chômage qui recule alors qu'on vous annonçait bruyamment le contraire.
Ces résultats, vous le comprenez, sont d'une grande importance pour la
France. Ils signifient que l'action ferme, courageuse, persévérante,
entreprise par le gouvernement sous l'impulsion personnelle de son Premier
ministre, Raymond Barre, est en train de porter ses fruits. Je le félicite
pour son courage, sa compétence et sa loyauté.
Mais rien n'aurait pu être accompli sans vous, sans vous qui avez soutenu le
redressement par votre discipline et par votre effort. Ces résultats sont
votre bien, difficilement acquis. Est-ce le moment de les remettre en cause?
Ne vaut-il pas mieux poursuivre l'effort, déboucher enfin sur une situation
assainie, sur une économie rétablie, sur des conditions favorables de vie ?
Pensez à la situation d'une personne tombée à la mer et qui nage, qui nage à
contre-courant pour regagner la rive !
Le courant est puissant. Mais, à force de nager, elle s'est rapprochée du
rivage. Elle y est presque. Elle va le toucher.
Alors une voix vient lui conseiller à l'oreille : pourquoi te donner tant de
peine ? Tu commences à être fatiguée. Tu n'as qu'à te laisser porter par le
courant.
Elle hésite. C'est bien tentant. Pourquoi ne pas se laisser aller ?
Mais quand on se laisse emporter par le courant, on se noie.
Oui, il faut achever le redressement de notre économie.
*
* *
L'autre voie est l'application du Programme commun.
Je vous ai parlé du Programme communiste en 1974 pendant la campagne
présidentielle, et vous m'avez donné raison.
Mon jugement n'a pas changé et il n'est pas lié aux prochaines élections.
J'ai le devoir de vous redire ce que j'en pense, car il ne s'agit pas pour
moi d'arguments électoraux, mais du sort de l'économie française.
L'application en France d'un programme d'inspiration collectiviste
plongerait la France dans le désordre économique.
Non pas seulement, comme on veut le faire croire, la France des possédants
et des riches, mais la France où vous vivez, la vôtre, celle des jeunes qui
se préoccupent de leur emploi, celle des personnes âgées, des titulaires de
petits revenus, des familles, la France de tous ceux qui souffrent plus que
les autres de la hausse des prix.
Elle entraînerait inévitablement l'aggravation du déficit budgétaire et la
baisse de la valeur de notre monnaie, avec ses conséquences sur le revenu
des agriculteurs et sur le prix du pétrole qu'il faudra payer plus cher.
Elle creuserait le déficit extérieur, avec ses conséquences directes sur la
sécurité économique et sur l'emploi. Une France moins compétitive serait une
France au chômage !
Toutes les études qui ont été faites par des personnalités non politiques,
toutes les expériences qui ont eu lieu chez nos voisins, aboutissent à la
même conclusion. Il n'existe pas un seul expert, un seul responsable
européen pour dire le contraire.
Tout cela, votre réflexion permet de le comprendre.
Vous pouvez choisir l'application du Programme commun. C'est votre droit.
Mais si vous le choisissez, il sera appliqué. Ne croyez pas que le président
de la République ait, dans la constitution, les moyens de s'y opposer.
J'aurais manqué à mon devoir si je ne vous avais pas mis en garde.
*
* *
Il faut ensuite que la France puisse être gouvernée.
Vous avez constaté avec moi combien il est difficile de conduire un pays
politiquement coupé en deux moitiés égales.
Personne ne peut prétendre gouverner un pays qui serait coupé en quatre.
Quatre grandes tendances se partagent aujourd'hui les électeurs, deux dans
la majorité, deux dans l'opposition. Aucune de ces tendances ne recueillera
plus de 30 % des voix. Aucune d'elles n'est capable de gouverner seule.
Beaucoup d'entre vous, parce que c'est dans notre tempérament national,
aimeraient que le parti pour lequel ils ont voté, qui est le parti de leur
préférence, soit capable de gouverner seul. C'est même leur espoir secret.
Il faut qu'ils sachent que c'est impossible.
Aucun gouvernement ne pourra faire face aux difficiles problèmes de la
France avec le soutien de 30 % des électeurs. Si on tentait l'expérience,
elle ne serait pas longue, et elle se terminerait mal.
Puisqu'aucun des partis n'est capable d'obtenir la majorité tout seul, il
lui faut nécessairement trouver un allié. C'est ici que la clarté s'impose.
Un allié pour gouverner, ce n'est pas la même chose qu'un allié pour
critiquer ou pour revendiquer.
Gouverner, c'est donner, mais c'est aussi refuser et parfois, pour servir la
justice, c'est reprendre. Or, il est facile de donner mais il est difficile
de refuser ou de reprendre.
Si des partis sont en désaccord lorsqu'il s'agit de promettre, comment se
mettront-ils d'accord quand il s'agira de gouverner ? Dans les villes qui
ont été conquises par de nouvelles équipes, combien de budgets ont été votés
en commun ? Qui votera demain le budget de la France ?
Il faut donc que vous posiez aux candidats la question suivante : puisque
vous ne pouvez pas gouverner tout seuls, quels alliés avez-vous choisis ?
Et deux alliances se présentent à vous :
L'une est l'alliance de la majorité actuelle. Elle a démontré qu'elle
pouvait fonctionner, malgré des tiraillements regrettables. Elle a travaillé
dans le respect des institutions, dont la stabilité constitue une de nos
plus grandes chances et qui doivent être par-dessus tout protégées. Elle a
soutenu l'action du gouvernement. Elle a voté le budget de la France.
Elle comprend, à l'heure actuelle, deux tendances principales, ce qui
est naturel dans un aussi vaste ensemble, et ce qui répond au tempérament
politique des Français. Chacune de ces tendances met l'accent sur ses
préférences et exprime son message. Chacune fait connaître clairement et
franchement, selon sa sensibilité propre, ses propositions pour résoudre les
problèmes réels des Français. Chacune fait l'effort indispensable pour se
renouveler et pour s'adapter. Jusque-là, quoi de plus naturel ?
Mais il doit être clair qu'elles ne s'opposent jamais sur l'essentiel et
qu'elles se soutiendront loyalement et ardemment au second tour.
Dans chacune de ces tendances, des hommes ont soutenu l'action du général de
Gaulle. Dans chacune de ces tendances, des hommes ont soutenu ma propre
action de réforme. Et ce sont d'ailleurs, le plus souvent, les mêmes ! Que
toutes deux cherchent dans l'histoire récente de notre pays des motifs de
s'unir et non de se diviser.
J'ajoute que, pour que l'actuelle majorité puisse l'emporter, il est
nécessaire que chacune de ces tendances enregistre une sensible progression.
Aucune ne peut prétendre obtenir ce résultat toute seule ! Si elles veulent
réellement gagner, la loi de leur effort doit être de s'aider et non de se
combattre !
L'autre alliance est celle qui propose le Programme commun.
Les partis qui la composent se sont apparemment déchirés depuis six mois.
Aujourd'hui, voici qu'ils indiquent à nouveau leur intention de gouverner
ensemble. Quelle est la vérité ? L'équivoque sur les alliances ne peut pas
être acceptée, car elle dissimule un débat de fond sur lequel l'électeur a
le droit d'être informé au moment de choisir.
Il y a, en effet, deux questions fondamentales :
— Y aura-t-il ou non une participation communiste au gouvernement ?
— Le gouvernement appliquera-t-il ou non le Programme commun ?
Le choix de l'alliance pour gouverner ne peut pas être renvoyé au lendemain
des élections. Ce serait retomber dans les marchandages et dans les
interminables crises politiques que les Français condamnaient sans appel
quand ils en étaient jadis les témoins humiliés.
Vous avez droit à une réponse claire sur un point qui engage notre stabilité
politique : avec quel partenaire chacune des grandes formations politiques
s'engage-t-elle à gouverner ?
Car il faut que la France puisse être gouvernée.
*
* *
Mais le choix des Français ne doit pas être seulement un choix négatif.
Il ne suffit pas que les uns votent contre le gouvernement et les autres
contre le Programme commun pour éclairer l'avenir de notre pays.
Un peuple ne construit pas son avenir par une succession de refus.
Dans la grande compétition de l'Histoire, un peuple gagne s'il sait où il
veut aller.
C'est pourquoi je propose à la France de continuer à avancer dans la
liberté, vers la justice et vers l'unité.
Et c'est à vous de le faire connaître à vos élus.
*
* *
Patiemment, depuis trois ans et demi, malgré les difficultés économiques,
malgré le conservatisme des uns, malgré l'incompréhension des autres, j'ai
fait avancer la France vers davantage de justice.
Jamais en trois ans et demi le sort des personnes âgées n'a été plus
régulièrement et plus sensiblement amélioré.
Jamais la situation des plus démunis, de ceux qui ne parlent pas le plus
fort, les handicapés, les femmes isolées, les travailleurs licenciés, n'a
fait l'objet d'autant de mesures nouvelles.
L'indemnisation de nos compatriotes rapatriés, en attente depuis quinze ans,
a été proposée et décidée, et je veillerai à sa juste application.
Les évolutions de notre société en profondeur ont été comprises et
encouragées par l'action en faveur de la condition des femmes, et de la
situation de ceux qui fabriquent de leurs mains la richesse de notre pays,
je veux dire les travailleurs manuels.
L'aide aux familles a été simplifiée et désormais sensiblement augmentée.
Et le résultat de toute cette action a été une réduction des inégalités en
France, réduction désormais constatée dans les statistiques et qui n'est
plus niée que par ceux qui craignent d'être privés d'un argument électoral.
Oui, notre peuple avance vers la justice. Je sais que vous avez peu à peu
compris le sens de mon effort.
Je suis le premier à dire, le premier à reconnaître que tout n'est pas
parfait et que nous avons encore beaucoup à accomplir ensemble.
En juillet dernier, devant un auditoire semblable au vôtre, par une autre
température, à Carpentras, j'ai demandé au Premier ministre et au
gouvernement, dont c'est le rôle naturel, de déterminer les moyens d'action,
c'est-à-dire l'engagement de ce qu'un gouvernement peut faire de précis pour
améliorer le sort des Françaises et des Français.
Le Premier ministre vient de présenter ces objectifs d'action, et vous
commencez à les connaître.
J'y retrouve, en particulier, trois grands desseins qui me tiennent à cœur.
Le premier d'entre eux est de rendre les Français propriétaires de la
France.
Non pas propriétaires collectivement par l'intermédiaire d'une bureaucratie
de plus, qui étendrait encore le domaine tentaculaire de l'État, mais
propriétaires individuellement de la France par la propriété de leur
logement, par la propriété de leur outil de travail, s'ils sont producteurs
individuels, et par une plus large diffusion de la propriété des grandes
entreprises.
Le général de Gaulle en avait eu l'intuition lorsqu'il a parlé de
participation, et qu'il a exprimé par ce mot une idée directrice susceptible
d'applications multiples. Nous avons avancé dans cette voie en créant cette
année l'aide personnalisée au logement, qui va désormais faciliter
l'accession à la propriété.
Dans notre peuple français, composé de terriens souvent déracinés, il faut
rendre des racines à chacun. Et y a-t-il des racines plus profondes que
celles qui vous lient à votre maison, à votre terre, à votre instrument de
travail ?
Oui, il faut rendre les Français propriétaires individuels de la France.
Le deuxième objectif concerne la jeunesse.
Notre société n'a pas bien deviné et n'a pas bien compris les problèmes de
la jeunesse. Elle a sans doute amélioré utilement certains aspects de
l'éducation, de la formation, de l'accès à l'emploi.
Mais elle n'a pas compris que les rapports entre une jeunesse nouvelle et un
monde nouveau supposaient une approche, elle aussi, nouvelle.
La jeunesse française, une des plus vigoureuses et des plus sympathiques du
monde, notre vraie chance nationale, la jeunesse française vit trop souvent
à part, dans son propre univers, ailleurs et autrement.
Il faut nous mettre à son écoute, sans prétention et sans paternalisme, et
rechercher avec elle comment rétablir la filière continue allant de la
formation vers l'emploi, et comment lui permettre de concilier son besoin
d'indépendance et son droit à la sécurité.
Le troisième objectif est celui de la qualité de la vie.
Parce qu'il faut savoir qu'il y a autant d'injustice dans l'accès à la
qualité de la vie qu'il peut y en avoir dans la répartition des ressources.
Qu'il s'agisse des transports en commun, de refus du gigantisme, de la lutte
contre le bruit, de l'accès aux vacances, de la répartition des espaces
verts et des équipements sociaux, nous devons continuer à réduire les
inégalités qui subsistent.
Ainsi, ensemble, nous avancerons vers la justice.
*
* *
Et au-delà de la justice, l'unité.
L'unité, un grand rêve pour la France.
Ma recherche de l'unité, ce n'est pas une manie. Elle n'est pas destinée
simplement à rendre plus facile l'action du président de la République.
Elle correspond à notre situation historique.
Nous n'en sommes plus au temps où, comme en 1789, la population de la France
représentait presque autant que la population de l'Allemagne et de
l'Angleterre réunies, et plus de cinq fois celle des États-Unis d'Amérique.
Une époque où la France, même divisée, pouvait encore assurer sa sécurité et
faire entendre sa voix.
Aujourd'hui, sur mille habitants de la planète, il y a moins de quinze
Français.
Si nous dispersons nos forces, si nous nous disputons à l'excès, si avant le
début du match, l'équipe de France se coupe en deux et en vient aux injures,
croyez-vous que la France puisse gagner ?
L'unité est la condition du rayonnement de la France.
Notre pays a soif de vérité, de simplicité et d'unité.
J'agis obstinément pour l'unité. Je n'ai jamais répondu depuis trois ans et
demi aux critiques et aux attaques.
Et c'est pourquoi je tends la main, sans me lasser, à tous les dirigeants
politiques.
Avec obstination, je continuerai mes efforts pour étendre, je dis bien
étendre, la majorité.
Soyons clairs, car on empoisonne parfois le choix des Français par des
rumeurs.
Il ne s'agit, de ma part, d'aucune manœuvre obscure ou de combinaison
machiavélique, mais de la recherche patiente des conditions qui permettront
d'associer un nombre croissant de Français à l'œuvre commune.
Je vous le dis en tant que président de la République et en dehors de la
compétition des partis : plus nombreux sera l'équipage et plus loin ira le
navire.
Là encore, laissez-vous guider par le bon sens.
L'application d'un programme collectiviste aggraverait la coupure de la
France, en déclenchant de profondes divisions et en suscitant des rancunes
durables. Elle retarderait de plusieurs années l'effort vers l'unité.
Il faut, pour parvenir à l'unité, que vous m'y aidiez. Les candidats, au
moment de l'élection, sont extraordinairement attentifs au message des
citoyens. Exprimez donc aux candidats le message que la majorité doit, non
se diviser, mais s'étendre.
La majorité, dont la France a besoin, ce n'est pas celle d'un front du
refus, mais une majorité prête à l'effort pour la liberté, l'unité et la
justice.
Il faut aussi veiller à la réputation de la France.
Je suis ici au plus profond de mon rôle, et je regrette d'ailleurs d'être
presque le seul à en parler.
La France est aujourd'hui considérée et respectée dans le monde. Considérée
et respectée davantage peut-être que vous ne le croyez.
Elle entretient un dialogue loyal et ferme avec les deux superpuissances,
dont j'ai reçu les chefs en visite en France.
Elle participe activement aux réflexions internationales sur la
prolifération nucléaire et, désormais, sur le désarmement.
Elle apparaît à la fois comme un pays pacifique, mais capable, quand il le
faut, d'agir.
Dans le tiers monde, déchiré par trop d'interventions extérieures, la France
est à la tête des efforts pour le développement. Elle reste, pour ses
partenaires africains, une amie fidèle et sûre.
En Europe, elle poursuit la tâche lente, difficile et nécessaire de l'union
de l'Europe. Personne ne suspecte sa volonté d'y contribuer. Elle prendra à
nouveau, le moment venu, les initiatives nécessaires.
Oui, la France est aujourd'hui considérée et respectée. Plus personne, comme
c'était le cas à certains moments de notre histoire récente, ne sourit de la
France.
Cela est dû à la stabilité et à la fermeté de sa politique.
Cela est dû aussi à l'effort qu'elle a accompli pour se doter d'une défense,
qui garantisse sa sécurité et son indépendance, et qui doit être tenue à
l'écart des incertitudes.
Regardez un instant à l'extérieur, tout autour de nous : combien de pays
faibles, combien de gouvernements de crise, combien d'économies assistées !
Au moment de faire votre choix, pensez à la réputation de la France, comme
si c'était celle de votre famille.
Quelle réputation lui vaudraient dans le monde l'indécision, le choix de la
facilité, la fuite devant les réalités du moment ?
Oui, derrière nos intérêts, à chacun de nous, il y a un tout autre enjeu.
Il s'agit de veiller à la réputation de la France.
Mes chères Françaises et mes chers Français, je vous ai parlé du bon choix
pour la France.
Je l'ai fait, vous l'avez vu, avec une certaine gravité.
Il faut que je vous dise pourquoi.
Je vous raconterai pour cela un souvenir d'enfance.
Quand j'avais treize ans, j'ai assisté, en Auvergne, à la débâcle de l'armée
française. Pour les garçons de mon âge, avant la guerre, l'armée française
était une chose impressionnante et puissante.
Et nous l'avons vu arriver en miettes.
Sur la petite route, près du village où j'irai voter en mars, comme simple
citoyen, nous interrogions les soldats pour essayer de comprendre :
« Que s'est-il passé ? »
La réponse nous venait, toujours la même :
« Nous avons été trompés. » « On nous a trompés. »
J'entends encore, à quarante ans d'intervalle, cette réponse, et je me suis
dit que si j'exerçais un jour des responsabilités, je ne permettrais jamais
que les Français puissent dire : « On nous a trompés. »
C'est pourquoi, je vous parle clairement.
Les conséquences de votre choix, pour vous-mêmes et pour la France, chacune
et chacun d'entre vous peut les connaître. Il suffit de dissiper le
brouillard des promesses, des faux-fuyants et des équivoques. Il suffit que
vous vous posiez des questions très simples :
— Qui gouvernera la France au printemps prochain ?
— Qui poursuivra le redressement nécessaire de l'économie française ?
— Comment l'opinion internationale jugera-t-elle le choix politique de la
France ?
Chacune de ces questions comporte une réponse claire. Je n'ai pas à vous la
dicter, car nous sommes un pays de liberté. Mais je ne veux pas non plus que
personne, je dis bien personne, puisse dire un jour qu'il aura été trompé.
Et puisque nous parlons de la France, je conclurai avec elle.
Il m'a toujours semblé que le sort de la France hésitait entre deux
directions :
Tantôt, quand elle s'organise, c'est un pays courageux, volontaire,
efficace, capable de faire face au pire, et capable d'aller loin.
Tantôt, quand elle se laisse aller, c'est un pays qui glisse vers la
facilité, la confusion, l'égoïsme, le désordre.
La force et la faiblesse de la France, c'est que son sort n'est jamais
définitivement fixé entre la grandeur et le risque de médiocrité.
Si au fond de moi-même, comme vous le sentez bien, et comme, je le pense,
les Bourguignonnes et les Bourguignons l'ont senti pendant ces deux jours,
si, au fond de moi-même, je vous fais confiance, c'est parce que je suis sûr
qu'au moment de choisir, oubliant tout à coup les rancunes, les tentations,
les appétits, vous penserez qu'il s'agit d'autre chose, et que, qui que vous
soyez, inconnu ou célèbre, faible ou puissant, vous détenez une part égale
du destin de notre pays.
Et alors, comme vous l'avez toujours fait, vous ferez le bon choix pour la
France.
Avant de nous séparer, et puisque je vous ai dit que je conclurai avec la
France, c'est avec elle que nous allons chanter notre hymne national.
***
Le politologue Benoit Lapierre est un spécialiste de la politique étrangère et du droit international. Il faut comprendre que la justice politique est une composante du droit au niveau des États. Pour faire des bonnes analyses au niveau internationale il faut suivre une bonne formation politique.
RépondreSupprimerDu point de vu de la politique mondiale, les enjeux économiques sont à la base des tensions géopolitique. La formation le Code Slave est une formation politique qui permet de comprendre la société russe afin d'y faire des affaires. Elle apprend comment prendre contact avec acteurs économique de prend plan afin de pénétrer le marché russe.
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